DAVID
VINCENT
Cryptoria japonica, invisible kogetsudaï
Plan du jardin du Thabor permettant de localiser la sculpture de David
Vincent, Rennes
Photo: © Christophe Pichon, 2005
Dans le jardin du Thabor, la sculpture de David Vincent est invisible,
mais ce n'est pas parce qu'il n'y a rien d'exposé que l'artiste
ne nous expose rien.
Ainsi, dans un premier temps, je fus invité à me projeter
mentalement de l'autre côté de la planète pour visualiser
cette œuvre sous la forme d'un cône de sable blanc situé
dans un jardin de Kyoto. Je l'imaginai rapidement, préférant
plutôt l'oublier pour élaborer une réflexion sur
le statut de cette absence.
Me revinrent alors à l'esprit les propos d'Yves Klein: "À
vrai dire, ce que je cherche à atteindre, mon développement
futur, ma sortie dans la solution de mon problème, c'est de ne
plus rien faire du tout, le plus rapidement possible, mais consciemment
avec circonspection et précaution. Je cherche à être
"tout court". Je serai un "peintre". On dira de
moi : c'est le "peintre". Et je me sentirai un "peintre",
un vrai justement, parce que je ne peindrai pas, ou tout au moins en
apparence. Le fait que j'existe comme "peintre" sera le travail
pictural le plus formidable de ce temps." (1)
Au fond, j'aimerais que la sculpture de David Vincent relève
de cet état d'esprit. Je préfèrerais la considérer
comme l'énonciation d'une simple idée de la sculpture.
Une idée débarrassée de toute fonction servile
et magistralement délivrée de tout autre but que celui
de présenter l'immatériel comme dispositif à produire
du sens.
Car cette éclipse de l'objet, tout en offrant l'avantage d'établir
un rapport d'égal à égal avec notre conscience
perceptive et participative, constituerait ainsi une analyse critique
des conditions de la production esthétique et de sa réception.
Dès lors, elle poserait une question essentielle: une œuvre
sans forme ne serait-elle pas la seule forme apte à refléter
idéalement la diversité illimitée des constituants
de la pensée artistique?
GMV (2006)
(1) Yves Klein, "L'aventure
monochrome", in Catalogue du Centre Georges Pompidou, 1983
La galerie Art & Essai: David Vincent,
Cryptomeria japonica, Invisible kogetsudaï
Jardin du Thabor, Rennes, 2001. Partenariat: collecion Yoon Ja &
Paul Devautour